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Carte électorale : Ottawa veut un rejet d’appel d’Alexis Deschênes

La carte en vigueur reste contestée. (archives)

GASPÉ – Dans un mémoire déposé à la Cour d’appel fédérale, Ottawa demande au tribunal de rejeter la demande du député de Gaspésie-Les Îles-de-la-Madeleine-Listuguj qui réclame une révision du contrôle judiciaire du 21 février qui maintenait l’abolition du défunt comté d’Avignon-La Mitis-Matane-Matapédia.

Le Procureur général écrit que « contrairement aux prétentions de l’appelant, la Commission n’a pas écarté le facteur de la superficie ni créé une circonscription « trop vaste » en Gaspésie. Elle a plutôt considéré les arguments en lien avec la superficie et les a mis en balance avec l’ensemble des facteurs pertinents prévus par la Loi. Tel que l’a conclu le juge de première instance, sa décision est raisonnable. Il n’y pas lieu pour cette Cour d’intervenir », lit-on dans le mémoire.

Après avoir exposé les détails du processus de la révision de la carte électorale, le Procureur général décortique l’argumentaire d’Alexis Deschênes.

Le Procureur général croit que le juge de première instance a correctement conclu que le rapport final de la Commission de la représentation électorale pour le Québec était raisonnable, notamment que le principe de la parité électorale.

« Pour ce qui est de la région allant de Montmagny aux Îles-de-la-Madeleine, la Commission a considéré les facteurs qui s’imposaient, en particulier la superficie des circonscriptions et les communautés d’intérêts. Elle a conclu que la suppression de la circonscription d’Avignon s’imposait pour assurer la parité relative des électeurs de l’ensemble du Québec. Une dérogation ne pouvait être justifiée sans qu’il y ait un affaiblissement du vote des autres citoyens québécois », écrit le Procureur général dans son mémoire.

Ottawa rappelle que seules des circonstances extraordinaires peuvent justifier un écart de plus de

« C’est avec ces considérations en tête qu’elle a pris connaissance de la situation démographique dans la région allant de Montmagny aux Îles-de-la-Madeleine. Elle y a constaté que la population moyenne de chaque circonscription était la plus basse de toutes les régions du Québec, que les circonscriptions de Rimouski-Neigette Témiscouata-Les Basques, Gaspésie-Les Îles-de-la-Madeleine et Avignon avaient des écarts respectifs de – 21,5%, -30,3% et -35,5%, et que toutes les circonscriptions avaient observé une diminution relative de leur population », note le Procureur général.

Pour lui, « dans le but de respecter la parité relative du vote et à la lumière de ces écarts, il était légitime pour la Commission de proposer de retirer une circonscription dans la région. Le retrait de la circonscription d’Avignon était l’alternative la plus propice, puisque c’était la circonscription la moins peuplée et que sa situation géographique permettait aux circonscriptions de Rimouski-Neigette-Témiscouata-Les Basques et Gaspésie-Les Îles-de-la-Madeleine d’en absorber les composantes », soulignant pendant ce temps que les régions des Laurentides et Lanaudière avaient vu leur population augmenter de 19,7 %.

« Pour pouvoir maintenir les anciennes circonscriptions, la Commission aurait dû démontrer que des circonstances extraordinaires le justifiaient vu que les écarts pour les circonscriptions d’Avignon et Gaspésie-Les-Îles-de-la-Madeleine dépassaient -25%, ce qui aurait eu un impact sur l’ensemble de la carte électorale du Québec. Il n’était pas déraisonnable pour la Commission de conclure que ce n’était pas le cas », explique le Procureur général.

« La Commission a noté que la clause d’exception permettant des écarts supérieurs à 25 % n’a été appliquée au Canada qu’une douzaine de fois depuis son adoption il y a près de 40 ans », renchérit-il.

« Pour ce qui est des communautés d’intérêts, au moins 24 intervenants ont noté dans leurs représentations écrites en vue des consultations que le découpage était problématique en ce qu’il ne respectait pas les limites des municipalités régionales de comté de la région. Comme indiqué plus haut, la Commission a modifié les limites des circonscriptions proposées afin de répondre à certaines préoccupations exprimées par les participants, contrairement aux arguments de l’appelant », cite le Procureur général.  

« Le juge de première instance a correctement conclu que, hormis les municipalités régionales de comté, les demandeurs n’avaient pas démontré en quoi la Commission aurait omis de tenir compte d’autres communautés d’intérêts », ajoute le document.

Par ailleurs, le Procureur général note que l’appelant ne peut attaquer la décision de la Cour fédérale sur la base d’arguments soulevés pour la première fois en appel, notamment celui de la superficie.

En conclusion, Ottawa estime que « l’annulation du Rapport final avec effet immédiat pourrait engendrer des incertitudes importantes, puisqu’elle remettrait en question le bien-fondé des décrets de représentation et de la Proclamation, qui ne sont pas contestés en l’instance, ainsi que la validité des circonscriptions pour lesquelles les députés ont été élus le 28 avril 2025. Ce faisant, le seul remède possible serait d’émettre une déclaration d’invalidité du Rapport final assortie d’une suspension de la déclaration pour une période donnant suffisamment de temps pour corriger la situation. Cela pourrait par exemple permettre au Parlement de mandater une commission pour refaire l’exercice de découpage électoral de l’ensemble du Québec », demande le Procureur général dans le cas où la cause était entendue et que la Cour accueillait l’appel et donnait raison à M. Deschênes.

Alexis Deschênes avait déposé un mémoire en juillet en trois axes : la loi dit que la circonscription ne doit pas être trop vaste, enseigne que la superficie doit être un facteur d’analyse et que la commission électorale n’a pas fait d’analyse rationnelle en ce sens. 

Selon toute vraisemblance, une date d’audition pourrait être fixée à la fin de 2025 ou en 2026.

Le 21 février, le juge Sébastien Grammond de la Cour fédérale écrivait dans sa décision de 32 pages que « les motifs donnés par la Commission pour justifier la suppression de la circonscription d’Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia étaient raisonnables et conformes au principe de la représentation effective élaboré par la Cour suprême. En effet, la parité relative du pouvoir électoral en est la composante primordiale. La Commission était consciente des enjeux liés à la superficie des circonscriptions dans les régions rurales ou éloignées, mais il était raisonnable de conclure que ces enjeux ne justifiaient plus l’existence d’une circonscription dont la population était inférieure de près de 36 % à la population moyenne des circonscriptions québécoises ».

Il ajoutait que « la Commission a bien compris les principes juridiques qui encadraient sa mission. Elle a pris en considération les arguments qui lui ont été présentés lors des audiences publiques. Elle a retenu certaines suggestions qui lui ont été faites et elle a modifié la limite entre les circonscriptions proposées de Rimouski–La Matapédia et de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj afin de respecter les limites des MRC. Elle a cependant maintenu sa recommandation de supprimer la circonscription d’Avignon–La Mitis Matane–Matapédia. Bien que les demandeurs soient en désaccord, il s’agit d’une décision raisonnable. Je n’ai pas été convaincu que la Commission a commis les erreurs que les demandeurs lui reprochent ».

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