Les agents des pêches menottés
OTTAWA – Depuis quelques semaines, des révélations faites au Comité permanent des pêches de la Chambre des communes laissent croire que les agents des pêches n’ont pas la liberté absolue de faire appliquer les lois.
« On assiste à des révélations à peu près à chaque réunion. On découvre que des langues se délient et une professeure qui a rencontré des agents des pêches lui auraient dit qu’ils étaient terrifiés d’intervenir de crainte de subir des représailles de la part de la hiérarchie », commente le député de Gaspésie-Les Îles-de-la-Madeleine-Listuguj, Alexis Deschênes, qui est membre de ce comité.
Devant les éléments qui sont dévoilés, le député entend creuser la question.
« On se fait dire qu’il y a parfois des signalements qui sont faits mais les agents des pêches n’interviennent pas. Pourquoi ils n’interviennent pas ? Est-ce qu’ils manquent de moyens ou il y a une pression des autorités du ministère des Pêches pour qu’ils n’interviennent pas ? Cela soulève des questions et on va continuer de poser des questions. On ne peut accepter que la loi ne s’applique pas à tous », affirme l’élu.
Dans un contexte où la ressource se fait plus rare dans plusieurs pêches, leur rôle est essentiel.
« Il y a un enjeu de durabilité de ressource. Il y a aussi un enjeu de justice pour les entreprises et les pêcheurs qui respectent les règles, qui paient leurs permis. Est-ce qu’il y a un secteur de pêche illégal et si oui, est-ce qu’il est important ? Et si oui, pourquoi il n’y a pas d’intervention ? », questionne M. Deschênes.
Devant ces constats, la ministre des Pêches Joanne Thompson a réagi en indiquant qu’elle se montre consciente du problème et qu’elle est allée chercher des ressources humaines pour solidifier le secteur des agents des pêches.
« On verra ce que ça donne. J’en suis encore à documenter le problème. Ce qu’on réalise, c’est qu’à chaque fois qu’on pose des questions, les gens ont le goût que les choses soient dites. C’est la première étape pour comprendre la situation », poursuit l’élu.
Durant les audiences, les députés ont appris qu’il y a interférence politique pour empêcher que des poursuites soient entreprises contre des contrevenants à la Loi sur les pêches, selon Daniel Fleck qui a travaillé 33 ans au ministère des Pêches.
Des agents des pêches sont limités dans leur travail contre la pêche illégale par des pressions venant de la haute direction du MPO, selon Randy Nelson qui a travaillé au ministère des Pêches 35 ans.
Des signalements sont faits aux agents des pêches mais aucune suite n’est donnée par manque d’effectif et suivant des pressions politiques, selon Jeremy Boudreau de l’Association de l’industrie maritime Gaspareau en Nouvelle-Écosse.
L’émission Enquête de Radio-Canada démontre jeudi qu’il existe un marché parallèle de la pêche au homard et les captures sont vendues au noir au Québec et dans les Maritimes.
Le député a profité ce ces nouvelles révélations pour demander au comité des pêches d’aller encore plus loin dans ce dossier.
« J’ai de la misère à accepter le fait que dans un pays du G7 où l’état de droit doit être respecté, on constate que la Loi sur les pêches n’est pas appliquée dans de trop nombreux cas », mentionne l’élu devant ses collègues.
C’est pourquoi il a demandé au comité à la suite de ces révélations d’ajouter trois réunions supplémentaires en invitant des agents des pêches ou leurs représentants syndicaux, la direction de la conservation du ministère des Pêches, le sous-ministre, des représentants de la GRC et de la Garde côtière à témoigner.
Par