Coup double pour le Chantier naval Forillon

GASPÉ – Deux événements marquants ont été soulignés mercredi avant-midi au Chantier naval Forillon de Gaspé avec la fin du contrat de construction de 10 navires de recherche et sauvetage et le début de l’assemblage d’un nouveau navire de recherche diesel-électrique pour la Garde côtière canadienne.

Devant un parterre d’employés fiers de la fin de ce chapitre et le début d’un autre, le président-directeur général, Jean-David Samuel, cachait mal la satisfaction du devoir accompli par son équipe et la croissance de l’entreprise au cours de la dernière décennie.09

« On était 37 à l’époque lorsqu’on a eu le contrat en 2015. Aujourd’hui, on est près de 100 travailleurs. Ça fait une belle croissance. On a aussi grandi en capacité de gestion. On était trois ou quatre à l’époque et maintenant, on a une structure d’équipe qui est prête pour construire à peu près tous les bateaux de moins de 1000 tonnes ici à Gaspé », note le gestionnaire.

Le chantier avait obtenu le contrat pour six navires pour des bateaux de recherche et sauvetage en 2015 d’une valeur de 45 millions $ et une option de quatre autres ajoutés en 2018 pour 30 millions $ supplémentaires.

Le dernier de ces navires, le Baie-de-Gaspé, a été livré mercredi à la Garde côtière au port de Rivière-au-Renard en présence de représentants de haut niveau et d’équipages de l’organisation fédérale.

Entre l’obtention du contrat et la fin de se dernier, la pandémie a frappé, mais n’a pas eu un grand impact sur les coûts de réalisation du contrat, malgré l’explosion des coûts des matières premières.

« On a été chanceux d’une certaine façon. On avait eu les quatre options en 2018. On avait fait beaucoup d’approvisionnement à long terme. Ça nous a beaucoup aidé. Au niveau de l’acier et de l’aluminium, c’était déjà acheté. Les moteurs étaient déjà achetés. C’est vraiment dans les plus petits items où ça a eu un eu plus d’impact. La valeur était moindre. Ça nous a permis de rester compétitif », calcule M. Samuel qui indique que l’impact n’aura été qu’un petit pourcentage sur la marge de profit.

Construction du nouveau navire de recherche

Il y a un an, le chantier obtenait d’Ottawa le contrat pour pour construire le premier navire semi-hauturier de recherche halieutique hybride diesel-électrique pour la Garde côtière canadienne d’une valeur de 55,5 millions $.

« On a reçu l’acier. On est vraiment en construction depuis quelques semaines. L’ingénierie est très avancée. Le projet avance bien et on devrait avoir une livraison dans deux ans environ », note M. Samuel alors que toute la phase de conception a été réalisée depuis l’annonce de l’obtention du contrat en octobre 2024.

Le nouveau bateau, dont le nom n’a pas été annoncé mais qui fera référence aux Premières nations, sera doté d’un système de stockage d’énergie par batterie, conçu pour réduire la consommation de combustibles fossiles.

Sa conception comprend des caractéristiques axées sur la réduction de la consommation d’énergie, telles qu’un système de propulsion hybride avec un groupe de batteries et des systèmes d’équipement électrique et de pont économes en énergie.

Le navire émettra beaucoup moins de gaz à effet de serre qu’un navire non hybride, et sera capable d’effectuer des opérations à basse vitesse sur batterie pendant 30 à 60 minutes par jour.

De plus, les batteries peuvent supporter les opérations de nuit pour éviter d’utiliser des générateurs portuaires, et ainsi générer moins de pollution et de bruit ambiant.

Cependant, un des bébés du chantier en 2013, le traversier hybride Peter-Fraser qui fait la navette entre L’Isle-Verte et Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, près de Rivière-du-Loup, ne peut plus compter sur ses batteries qui ont atteint leur fin de vie utile.

« La règlementation était à son début. On recule à 2011 pour l’ingénierie du Peter-Fraser. Quatorze-ans plus tard, la réglementation a changé. C’est possible de les changer, mais il y a des modifications à faire au navire. Est-ce que ce sera la même chose dans 10 ans ? Ou ce sera une nouvelle technologie ? On ne peut pas prédire ce que ce sera dans 10 ans ou 15 ans », évoque le gestionnaire.

Le lancement de la construction a été souligné avec la cérémonie de la pièce de monnaie sur la coque du navire.

« C’est une tradition maritime. On veut porter chance au navire », évoque M. Samuel.

Jusqu’à 40 travailleurs oeuvreront sur la construction du navire lors des moments forts.

Une vingtaine de personnes viennent en support à la construction.

La main-d’œuvre est au rendez-vous pour assurer les activités du chantier naval.

D’autres contrats sont dans la mire.

« On cible autant au privé qu’au gouvernemental. Le secteur va bien. On regarde tout ce qui se passe. Oui, on veut continuer notre croissance », affirme le président-directeur général.

Grappe de construction navale

En décembre 2024, la MRC de Gaspé rêvait d’établir une grappe industrielle régionale en construction navale sur un horizon de cinq ans.

Le concept est un atout pour le développement du chantier.

« D’avoir l’appui de la MRC aide énormément. On ne se sent pas seul. On a des gens, un écosystème, des fournisseurs qui veulent s’impliquer. C’est important parce que d’aller dire aux élus, on veut croître mais pas juste pour nous mais pour tout l’économie locale, c’est important. C’est porteur pour nous », dit-il.

Le maire de Gaspé et préfet de la MRC de la Côte-de-Gaspé, Daniel Côté, présent à la cérémonie, a noté la grappe industrielle dans sa courte allocution.

« C’est grâce à vous qu’on est en train de positionner l’industrie navale à l’échelle québécoise, canadienne et mondiale. Pourquoi ? Parce qu’on pense qu’il y a un potentiel incroyable de développer l’industrie navale ici pour diversifier notre économie et assurer l’avenir de notre coin de pays. C’est grâce à votre expertise », note M. Côté qui a souligné la confiance de la Garde côtière envers le chantier naval.